ChroniquesPublié le 16 janvier 2024
Parlons talents en entreprises, Benoit DUBOIS consultant
Vous nous parlez souvent des talents. C’est un mot qui est beaucoup utilisé, et on peu le trouver un peu galvaudé... De quoi s’agit plus précisément?
Je me retrouve très bien dans la définition toute simple du dictionnaire: un talent, c’est une aptitude particulière à faire quelque chose. Et nous avons tous des talents! Il y a des choses que nous savons bien faire, et qu’en général nous aimons bien faire, et ce ne sont pas les mêmes choses pour chacun.
Le talent est quelque chose d’inné, en ce sens qu’on ne choisit pas de l’avoir ou de ne pas l’avoir. On ne choisit pas d’avoir du talent de sportif, d’artisan ou de commerçant: on peut essayer, pour voir si on a du talent; on peut se former, s’entraîner, s’appliquer pour être meilleur même si on n’a pas beaucoup de talent, mais il ne suffit pas de vouloir, de le décider, pour avoir du talent. C’est donc inné, enfin pas complètement, il faut aussi développer ses talents, les déployer, il y a donc un espace pour la formation, le travail, l’effort et la progression.
Cette notion de talent s’applique quasiment à toutes les activités humaines, pas uniquement à celles qui relèvent du loisir ou de l’exceptionnel.
Il y a notamment des talents pour travailler : certains sont doués pour faire des choses de leurs mains, d’autres pour communiquer, pour réfléchir, pour imaginer, pour contrôler, pour décider, pour négocier, etc. Mais quelle que soit l’activité, il y a des personnes qui sont tout de suite plutôt douées, et d’autres qui ne le seront jamais. Et entre les deux, on a plus ou moins de talent...
Nous ne sommes pas égaux, est-ce que c’est heurtant?
Non, au contraire, c’est un aspect de la diversité, et c’est positif, c’est constructif! Ce qui est heurtant, c’est la façon dont on accueille ces différences, et notamment certains talents sont très mal rémunérés alors que d’autres le sont bien voire très bien. C’est aussi de dire que certaines personnes sont “des talents” et de renvoyer à la majorité des autres qu’elles n’en sont pas, qu’elles n’ont pas de talent. Je n’ai encore jamais rencontré de personne qui n’ait pas de talent.
Mais il faut bien considérer le talent comme un don, comme un cadeau qu’on a reçu. Et avec ce capital personnel, on reçoit aussi la responsabilité sociale, la responsabilité éthique, d’en faire profiter les autres.
La principale difficulté ne vient pas de ce qu’on pourrait qualifier d’égoïsme, c’est la difficulté de bien se connaître, d’avoir conscience de ses talents. Comme nous les avons depuis toujours en nous, nous avons beaucoup de mal à les voir, à être conscient des types d’activités pour lesquels nous avons quelque chose de plus. Ce sont pourtant les missions où nous serons à la fois plus heureux et plus performants.
Alors comment faire pour connaître ses talents?
Je propose trois pistes: essayer, entendre, éprouver.
Essayer, surtout ce qui nous attire. Mystérieusement, on a souvent une attirance pour des activités dans lesquelles on a plus de talent... En tout cas, quand on essaie, on se rend compte si on a de l’aisance et du plaisir, ou pas.
Entendre... pour entendre les compliments. Bien sûr, il faut qu’il y en ait, de la part des parents et des professeurs pour les enfants et les ados, de la part des proches et des collègues quand on commence sa vie professionnelle, de la part des managers, par pudeur on appellera cela feed-back plutôt que compliment, si on a de la chance d’avoir un manager qui en donnent. Pourquoi est-ce important d’entendre les compliments, parce que c’est le regard des autres qui nous renvoie nos talents, et la parole de l’autorité qui fait gagner en confiance en soi pour pouvoir les accueillir et les engager.
Eprouver enfin, éprouver le plaisir, la joie, le bonheur à faire telle ou telle chose, mais ça demande un peu de recul, d’introspection peut-être. Dans mon travail d’accompagnement individuel, j’aide mes clients à découvrir leur talent avec ces trois angles de vue, principalement à travers la relecture de leur histoire personnelle et de leur parcours professionnel: qu’est-ce que vous avez essayé, comment vous l’avez vécu, et pour les compliments, j’en donne aussi en qualifiant les réalisations réussies, il y en a toujours, alors que les feedbacks sont trop rares, surtout pour les personnes qui viennent me voir.
Et quand on connait ses talents, que se passe-t-il?
Et bien on peut les engager, c’est-à-dire en faire profiter les autres tout en travaillant à quelque chose dans lequel on est bon et qui nous plait.
Deux citations plutôt qu’un long discours. La première est d’un des plus talentueux artiste français du XXe siècle: « Dites vous bien que dans la vie, ne pas reconnaitre son talent, c’est faciliter la réussite des médiocres. » Vous aurez reconnu le style de Michel Audiard!
La seconde est attribuée à Confucius:
« Choisissez un travail que vous aimez et vous n’aurez plus à travailler un seul jour de votre vie. »